Au bord de la rivière Cane • Lalita Tademy

S’il est sorti en 2019 aux éditions Charleston, ce roman est en réalité une réédition de 2001. Son sujet m’intéressait évidemment beaucoup et j’ai enfin pris le temps de le découvrir, en sachant que ce serait sans doute une lecture qui m’accompagnerait quelques jours vu son nombre de pages.

Résumé …

A travers quatre générations de femmes noires américaines, cette émouvante saga familiale, riche en rebondissements, raconte la fin de l’esclavage. En 1837, Suzette est esclave chez de riches planteurs français installés en Louisiane. Ici, les blancs ne brutalisent pas les Noirs, ils les considèrent simplement comme des outils domestiques. Séduite et engrossée par Eugène Daurat, un bellâtre bordelais, elle va donner naissance à Philomène. L’émancipation est en route. Philomène sait se rendre indispensable et, à la mort de ses maîtres, toute la plantation repose sur ses épaules. Peu à peu, grâce à sa liaison avec Narcisse Fredieu, un fermier blanc fort épris d’elle, elle va mener combat afin d’obtenir de meilleures conditions de vie pour elle et ses enfants. Ce roman épique, inspiré d’une histoire vraie – celle de l’auteur -, s’appuie sur l’extraordinaire force de vie et la soif de progrès de ces femmes qui utilisent les seules armes dont elles disposent : patience, endurance, ruse et séduction pour trouver la force nécessaire à élever seules leur nombreuse progéniture, et à vivre les heures les plus sombres dans la promesse et l’espoir de la liberté.

Mon avis …

Quelle lecture riche et mémorable ! Sur plusieurs générations, nous allons suivre une famille, au coeur de la Louisiane, esclaves de génération en génération. C’est évidemment une lecture déchirante vu son sujet puisqu’elle nous plonge au coeur même de la vie des esclaves en plein coeur du XIX° siècle. Nous découvrons les membres de cette famille, les souffrances qu’ils traversent, leurs rêves mais surtout la violence qu’ils subissent. Les femmes, notamment, doivent se taire et sont souvent utilisées par les hommes blancs autour d’elles à des fins ignobles. Certains passages déchirent littéralement le coeur. J’ai rencontré quelques difficultés au fil de ma lecture car certains passages souffrent à mon sens de longueurs, mais au final, c’est l’essence même de ce livre qui le rend aussi important et indispensable.

Ce roman nous enseigne les années qui passent et tout ce que l’esclavage retire sans jamais rendre. Tout ce temps perdu, cette vieillesse infinie à 20 ans à peine, quand on a vécu plus qu’on pourrait en supporter au cours d’une seule vie. Être esclave, c’est appartenir à un autre être humain, ne rien pouvoir décider seul, n’avoir jamais aucun répit. Du jour au lendemain, on peut être vendu ou tué, et être séparé de ses proches, de son époux, de ses parents, de ses enfants. C’est n’avoir aucune possession, aucun nom de famille, ne pas savoir lire ni écrire, n’être personne aux yeux de la société. C’est n’avoir aucun rêve, aucune perspective d’avenir si ce n’est la souffrance. Et c’est cela dont nous fait prendre conscience ce livre.

« Tel était l’esclavage. Ne rien posséder, mais avoir toujours quelque chose à perdre. »

Le personnage de Philomène est indiscutablement le plus fort du roman, parce qu’elle a un don particulier, elle subit des Apparitions. De ce fait, certaines images lui viennent, lui montrant l’avenir. D’entre tous, c’est celle qui prend les décisions, quitte à manipuler, quitte à mentir. L’intérêt du roman, c’est aussi de nous montrer ce moment crucial de la Guerre de Sécession qui a incontestablement changé la donne. Nous assistons donc, avec les personnages, à ce changement de statut soudain, celui d’être enfin libre, puis la lutte perpétuelle pour conserver ses quelques droits, pour se faire une place dans la société où le racisme est encore tellement ancré. Cette même société qui connaîtra ensuite la ségrégation raciale. On ressent une profonde injustice en suivant cette famille, en constatant que malgré tous leurs combats, rien n’est jamais gagné et que chaque génération connaîtra ses propres souffrances, simplement du fait de la couleur de sa peau.

C’est une fresque familiale passionnante qui reflète le quotidien de l’esclavage, perpétué de génération en génération. C’est un superbe roman qui me marquera vraiment, même s’il y a eu quelques longueurs, notamment au cours de la dernière partie, où l’on sent que certains passages ont été davantage exploités que d’autres, je ne regrette vraiment pas d’avoir persévéré dans cette lecture. Dans la lignée de L’invention des ailes ou de La colline aux esclaves, je ne peux que vous recommander cette lecture si la thématique de l’esclavage et de tout ce qu’elle implique vous intéresse.

Pour résumer …

Une lecture importante, de celles qui nous rappellent ce que l’esclavage était vraiment, comment il se perpétuait génération après génération et combien certains êtres humains ont pu souffrir en raison de la prétendue infériorité raciale. Un très beau roman, même s’il comportait quelques longueurs un peu regrettables.

Ma note : ★★★★
(16/20)

6 réflexions sur “Au bord de la rivière Cane • Lalita Tademy

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