Pour que tu sois mienne • Sara Farizan

L’Iran est un pays sur lequel j’essaie de lire le plus souvent possible et je suis rarement déçue comme l’ont montré mes lectures du Voile de Téhéran et de La Voix Cachée. Celui-ci avait également tout pour me plaire et c’est la raison pour laquelle je me le suis offert.

Résumé …

Sahar a 17 ans et elle est amoureuse de sa meilleure amie, Nasrin, depuis l’enfance. Les deux jeunes filles ont échangé autant de baisers volés que de promesses d’amour éternel. Mais l’Iran est un pays dangereux pour les homosexuels : Sahar et Nasrin seraient battues ou même mises à mort si leur secret était révélé. Quand les parents de Nasrin décident de la marier, Sahar s’effondre. Son amie tente de lui démontrer que leur relation peut continuer dans le secret, mais Sahar ne peut s’y résoudre. La société ne l’autorise pas à partager la vie d’une femme. Et son cœur ne lui permet pas de partager l’amour de sa vie avec un homme. Cependant, les paradoxes d’un pays malade de sa religion fait que les mollahs lui permettent en revanche de vivre avec une femme, à la condition de devenir un homme. Si Sahar n’est pas la première héroïne de roman confrontée à la question « Jusqu’où suis-je prête à aller par amour ? », elle est l’une des rares à se débattre avec la réponse : « J’irais jusqu’à changer de corps ».

Mon avis …

Que signifie être une femme aujourd’hui, en Iran ? Sara Farizan s’interroge à ce sujet dans son roman, mais elle va plus loin puisqu’elle aborde la question de l’homosexualité. Dans une société où cela est condamné par la peine de mort voire la lapidation, il était en effet très intéressant de placer ce thème dans son roman. Je trouve que l’auteur a su approfondir son sujet en faisant naitre ces sentiments entre deux amies depuis l’enfance qui, depuis toujours, vivent plus que de simples rapports amicaux. Pourtant, leur entourage et la société dans laquelle elles vivent rendent leur amour impossible et c’est en secret qu’il va évoluer, en même temps qu’elles vont grandir. Cette amitié va réussir à camoufler ce qu’elles vivent pourtant au quotidien : une histoire d’amour passionnelle.

Lorsque l’une des deux est demandée en mariage par un homme accepté par sa famille, leur avenir semble se refermer d’un seul coup. Il est inimaginable de naître dans un pays où l’on est rejeté du seul fait de son orientation sexuelle et pourtant, c’est ce que va traverser l’héroïne de ce livre. C’est alors que le sujet de la transsexualité intervient. Pour Sahar, cela semble être la solution envisageable pour vivre comme elle l’entend, pour aimer une femme et être acceptée comme telle. Elle va donc entamer des démarches lorsqu’elle entend parler d’une opération permettant de devenir un homme. Elle se voit déjà vivre au bras de Nasrin, pouvoir la demander en mariage et l’épouser. Elle ne se sent certes pas être un homme au fond d’elle, mais si cela est la seule solution pour avoir Nasrin à ses côtés, alors elle est prête à tout. Sa détermination est surprenante. Comme si elle ne réfléchissait pas aux conséquences d’un tel acte pour sa vie et son corps. Comme si tout ce qui comptait, c’est de cesser de vivre dans le noir, de devoir vivre son histoire d’amour dans la clandestinité la plus totale.

J’ai été surprise, au départ, par ce choix de l’auteur. Je me suis interrogée sur la nécessité d’évoquer la transsexualité pour parler d’homosexualité. Mais plus le roman avançait et plus j’ai fini par réaliser que cela représente un fait de société. En effet, l’Iran est le deuxième pays du monde au regard du nombre d’opérations de changement de sexe puisque cette opération est financée directement par le gouvernement. Il s’agit de « réparer » les personnes homosexuelles. L’état considère que s’ils sont attirés par une personne de même sexe, c’est forcément qu’ils vivent dans le mauvais corps.

C’est à partir de là que j’ai trouvé le roman important et complètement terrifiant. Cela m’a même glacé le sang. J’ignorais naïvement tout cela et il est terrible de réaliser que beaucoup de personnes doivent aujourd’hui encore changer de sexe tout simplement pour pouvoir aimer librement. L’idéal d’un monde où chacun sera libre et égal à l’autre est encore si loin … L’auteur m’a ouvert les yeux sur le statut des homosexuels en Iran et à travers l’histoire de Sahar, j’ai compris ce que traversent des millions de personnes qui n’ont pas la chance de vivre dans un pays qui reconnait leurs droits. Je n’ai pas été complètement charmée par l’écriture et j’ai parfois eu des difficultés à apprécier Nasrin, que j’aurais aimé plus combative et moins égoïste, mais j’ai beaucoup apprécié cette lecture et tout ce qu’elle m’aura appris.

Pour résumer …

Sara Farizan décrit avec justesse le statut des personnes homosexuelles en Iran, dans une société où aucun droit ne leur est reconnu. C’est un livre engagé qui marque car il permet d’ouvrir les yeux sur un fait de société terrifiant et sur un Etat qui préfère encourager les changements de sexe plutôt que de reconnaître l’orientation sexuelle de chacun.

Ma note : ★★★★★☆
(16/20)

13 réflexions sur “Pour que tu sois mienne • Sara Farizan

  1. Coucou Fiona. J’ai énormément de romans dans ma pal se déroulant dans ces pays là et celui-ci me tente particulièrement. En effet il a l’air d’aborder un sujet particulièrement difficile et compliqué à aborder au vue des mentalités… merci pour ton avis. Bisous

  2. Coucou Fiona, je suis moi aussi très attirée par l’Iran. Je rêve d’y aller un jour.
    Je peux te conseiller Persepolis et les enfants de jacaranda (mais tu dois sûrement les connaître). Quand j ai lu le résumé du livre que tu présentes, je me suis dit qu il ne me plairait pas… j’avoue ne pas être très attirée par ce thème. Mais je ne savais pas que l’Iran était un pays où les opérations de changement de sexe sont monnaie courante et du coup je trouve le sujet très pertinent par rapport à la culture du pays et à leur vision de l homosexualité… à voir donc!!! 🙂 merci pour le partage!

  3. J’ignorais aussi cette partie qui concernait la transsexualité qui rend l’homosexualité légale dans ce pays… comme toi, j’en ai été horrifiée. Je trouve ce roman important et vraiment indispensable. Je suis heureuse que tu l’aies aimé 🙂

  4. Ce livre a l’air vraiment très intéressant ! je suis en train de découvrir l’Iran, que je ne connaissais pas du tout … j’ai lu Désorientale il y a quelques semaines (que je te conseille) et j’ai envie de continuer ma découverte de ce pays 🙂

  5. Je me le suis offert également, c’est un sujet qui me questionne beaucoup et je pense qu’il est nécessaire de s’informer. La littérature est une manière de se rendre compte qu’il existe encore des pratiques barbares, horrifiantes dans des pays pas si loin de nous…

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