La veille de son prix Goncourt, je découvrais un peu par hasard Leïla Slimani avec son roman Chanson Douce. J’ai été marquée par l’écriture puissante de cette auteur et encore plus par la femme qu’elle est quand j’ai ensuite fait la démarche d’aller l’écouter parler de ses romans.
En tombant sur ce recueil de textes publié récemment en librairie, je n’ai pas pu faire autrement que de me le procurer. Car il me faut tout simplement chaque livre de cette auteur. Il s’agit d’un recueil de textes qu’elle a écrits depuis 2014 dans le journal Le 1. Des textes, des nouvelles. Des mots pour s’exprimer sur des sujets d’actualité.
« Parce qu’elle est-un immense espace de liberté, où l’on peut tout dire, où l’on peut côtoyer le mal, raconter l’horreur, s’affranchir des règles de la morale et de la bienséance, la littérature est plus que jamais nécessaire. Elle ramène de la complexité et de l’ambiguïté dans un monde qui les rejette. Elle peut ausculter, sans fard et sans complaisance, ce que nos sociétés produisent de plus laid, de plus dangereux et de plus infâme. (…) C’est parce qu’elle peut tout dire que la littérature est un exercice si difficile. C’est parce qu’elle ne peut se contenter de pensées schématiques, de généralités, de clichés, qu’elle est importante et essentielle. »
J’ai envie de dire merci à cette femme d’éclairer le monde de son regard moderne, libérateur. De dénoncer à sa façon la pensée unique et la dictature religieuse. De prôner la liberté d’expression, de pensées, du corps. D’espérer qu’un jour les hommes cesseront de se diviser pour mieux se rassembler. De croire que chacun apporte beaucoup aux autres.
Le texte « Une armée de plumes » écrit en janvier 2015 et imprégné des attentats de Paris m’a particulièrement touchée. Il rappelle l’importance de la littérature, son rôle nécessairement engagé, ainsi que l’importance de son existence.
« Ces fanatiques, ces barbares incultes et ignorants, n’ont qu’un livre à brandir, et ils l’ont mal lu. Dans le monde arabe, on compte 60 millions d’illettrés sur une population de 280 millions. Selon l’ALESCO, chaque habitant ne consacre que six minutes par an à la lecture d’un livre, et la grande majorité des livres édités parlent de religion. Tous les dictateurs arabes le savent bien : en éduquant les hommes, on prend le risque qu’ils vous renversent. Et qu’ils défilent un jour, un stylo à la main. » (6 janvier 2015)
Et que dire de celui écrit après le 13 novembre, « Intégristes je vous hais » ? Il m’a émue aux larmes. Leila Slimani a des convictions qu’elle veut crier au monde, et elles font du bien. Parce qu’elles viennent du cœur et que c’est cela aussi, être libre. Pouvoir penser librement.
« A mourir pour mourir, sur des terrasses ou en écoutant de la musique, mourons au moins en défendant fermement nos convictions. »
« Un ailleurs » est une nouvelle qui a directement parlé à mon cœur, qui évoque les pouvoirs d’évasion que nous procurent les livres. Les voyages qu’ils nous permettent d’entreprendre. Notre enfance qu’ils rendent plus belle. J’ai eu le sentiment qu’elle racontait ma propre vie. Je me suis revue, enfant, visiter mille et un pays sans pourtant sortir de ma chambre.
Et puis, je crois que les citations que j’ai pu relever parlent d’elles-mêmes. La puissance de l’écriture de Leïla Slimani ne se décrit pas, elle se vit.
« Aujourd’hui, plus que jamais, je mesure la beauté de ma ville. Cette ville, je ne l’échangerais contre aucun des paradis que les fous de Dieu promettent. Vos fontaines de lait et de miel ne valent pas la Seine. Paris pour qui je serai un soldat. Paris, qui est tout ce que vous haïssez. Un mélange sensuel et délicieux de langues, de peaux et de religions. Paris où l’on s’embrasse à pleine bouche sur les bancs, où l’on peut entendre au fond d’un café une famille se déchirer pour des opinions politiques et finir sa soirée en trinquant à l’amour. Cette nuit, nos théâtres, nos musées, nos bibliothèques seront fermés. Mais demain ils ouvriront à nouveau et c’est nous, enfants de la patrie, mécréants, infidèles, simples flâneurs, adorateurs d’idoles, buveurs de bière, libertins, humanistes, qui écrirons l’histoire. » (14 novembre 2015)
Pour résumer …
Il serait futile de tenter de trouver des mots pour évoquer la puissance de l’écriture de Leïla Slimani et de ses textes, à l’image de la personne qu’elle est et des messages qu’elle porte. Ce recueil de textes fut une claque. J’ai ressenti chacun des mots au plus profond de mon coeur et n’ai pas pu m’empêcher d’être émue aux larmes.
Ma note : ★★★★★★
(20/20)
Tu donnes tellement envie de le lire après Chanson Douce (que j’ai adoré !)
Cette femme a une façon de dire haut ses convictions qui me rend admirative. C’est beau, tout simplement. Elle a des mots forts mais qui permettent une réelle prise de conscience. Un très recueil de texte je pense.
J’espère pouvoir lire prochainement le Goncourt de Leila Slimani. Celui me tente un peu moins.Très certainement que le principe des nouvelles me retient un peu.
Tu me donnes vraiment envie de découvrir la plume de cette auteure!
Merci pour ce bel article, tu donnes vraiment envie de découvrir ce recueil !
J’ai très envie de le lire depuis que tu m’en as parlé ! Affaire à surveiller de près…