Vous l’aurez sans doute remarqué : je lis très peu de documentaires. S’il y a bien quelque chose que mon métier de bibliothécaire m’apporte au quotidien, c’est cette ouverture sur de nombreux contenus vers lesquels je ne me serais peut-être pas tournée de moi-même. J’ai acheté ce livre pour la médiathèque où je travaille et j’ai ressenti une urgence à le lire, certaine qu’il allait énormément résonner en moi.
Résumé …
« Je voudrais que l’on dise ce que vivent les gens, que l’on raconte les quartiers, les immeubles, l’argent qui manque, l’absence de reconnaissance. Je voudrais oser les mots ghetto, stigmatisation, relégation. Je voudrais appeler à la clémence, au doute. Je voudrais que l’on se soucie des abandonnés. » Il est avocat pénaliste depuis trente ans. Enfant des cités, sa vocation est née de son histoire. Et parce que la misère côtoyée par le passé est celle qui fabrique les monstres défendus aujourd’hui, Thierry Illouz lance un appel. Pour qu’enfin on regarde l’autre, dans le box des accusés. Celui qui nous effraie, celui que l’on condamne. Et qu’il est urgent de comprendre.
Mon avis …
Ce n’est pas complètement un hasard si ce livre m’a attiré, puisque j’ai étudié le droit pendant 5 ans et ai notamment étudié le droit pénal, qui me passionnait réellement. L’engagement de Thierry Illouz dans son livre m’a donc beaucoup, beaucoup touchée, parlé, et j’ai ressenti que ses mots étaient profondément en accord avec mes convictions intimes. C’est un livre que j’aurais aimé pouvoir écrire, qui me semble nécessaire, voire même indispensable.
« Je m’étais rapproché de lui pour l’écouter. C’est une chose simple et naturelle que de se rapprocher de quelqu’un, et pas seulement pour un avocat. La facilité de ce rapprochement, le fait de se mettre à la place de l’autre, terrifie certains. »
Thierry Illouz est, dans son métier d’avocat pénaliste, confronté chaque jour à la violence et à l’incompréhension de ceux qui voudraient que ceux qu’ils désignent comme « monstres », les criminels, ne soient pas défendus, ne soient pas jugés, ne soient pas considérés comme des êtres humains. Alors, il a voulu prendre la plume et s’engager pour ces hommes et femmes accusés d’actes parfois terribles, et qui pourtant restent humains. Cela nous fait peur, sans doute, de considérer comme notre semblable une personne qui a commis un crime. C’est sans doute cela que tente d’expliquer l’auteur dans ce livre, aussi. Peut-être qu’au fond de nous-même, nous sommes effrayé de penser que nous aurions pu le commettre aussi, si notre vie avait été autre, si notre environnement avait été différent. Aucun enfant ne nait criminel, c’est une certitude. C’est donc la vie qui nous transforme et nous fait devenir ce que nous sommes.
« Défendre, ce n’est pas masquer mais dévoiler. »
C’est dans sa propre histoire que l’auteur va chercher une explication de cette envie de défendre l’autre, celui qui ne lui ressemble pas, mais qui est en situation de faiblesse, qui a besoin d’aide. Il remonte dans son enfance, fils de rapatriés algériens ayant grandi dans une cité, entouré de la pauvreté. Cette pauvreté même qui, des années plus tard, lui apparaitra comme l’élément clé de toute délinquance, de tout acte illégal que l’on condamne si fermement aujourd’hui. Que l’on ne veut pas comprendre. Cela fait tellement de bien de lire des discours comme celui-ci, qui ose mettre enfin les mots sur le véritable problème. Sur cet aspect social que l’on préfère bien trop souvent ignorer tant il est complexe. Parce que condamner ne sert à rien si l’on ne guérit pas le problème de base. Si l’on continue à ne pas vouloir s’interroger sur ces défaillances de notre pays, qui préfère laisser les personnes en marge de côté, ne pas s’interroger sur leurs problèmes.
Pour défendre et exercer son métier tel qu’il le conçoit, Thierry Illouz ose poser ces questions-là. Il a ce courage et cette envie de vouloir creuser dans chaque personnalité, dans la vie de chaque individu pour tenter de comprendre son parcours, les épreuves qu’il a traversées, les obstacles sur sa route, permettant de comprendre ce qui l’a amené à commettre son acte. C’est une démarche qui dérange, car elle met inévitablement en lumière les échecs de notre société, et les œillères que nous préférons garder. Ce livre est très intéressant pour enfin porter un regard différent sur le métier d’avocat et le sens de la justice.
Pour résumer …
Comment défendre l’impardonnable ? Thierry Illouz, avocat pénaliste, défend chaque jour ceux que la société appelle « monstres ». C’est sa vision de la justice et de son métier qu’il exprime dans cet ouvrage nécessaire et engagé, qui a résonné avec mes convictions profondes.
Ma note : ★★★★★☆
(17/20)
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J’ai eu la chance d’assister à une lecture de ce texte par Charles Berling, et c’était sublime. Je comprends ton coup de cœur !
Moi qui suis dans le droit, je pense que je vais apprécier cette lecture! Merci pour la découverte 🙂