Vous l’ignorez sans doute mais j’admire Olivia de Lamberterie depuis longtemps. Parce qu’elle représente ce qui m’inspire, ce désir de transmettre mon amour pour les livres de la façon la plus juste et la plus sincère possible. Parce qu’elle est un exemple, journaliste littéraire pour ELLE et chroniqueuse littéraire pour Télématin, entre autres. J’ai pu partager deux repas à ses côtés, dans le cadre d’évènements littéraires et j’ai chaque fois été touchée par sa passion et sa simplicité. C’est une personne qui m’inspire et que je respecte profondément. Invitée pour la présentation de la rentrée littéraire de Stock à Lyon, j’ai pu l’écouter parler de ce premier roman, et repartir avec un exemplaire, que j’ai aussitôt décidé de lire. J’ai été bouleversée par ses mots, prononcés lors de ce repas, évoquant avec pudeur le décès de son frère et l’écriture de ce livre. C’est ce roman que j’ai choisi comme première découverte de la rentrée littéraire 2018 et c’est avec émotion que je vous en parle enfin, près de trois mois plus tard. Ce livre sort en librairie le 22 août. Merci à Stock pour cette lecture.
Résumé …
Les mots des autres m’ont nourrie, portée, infusé leur énergie et leurs émotions. Jusqu’à la mort de mon frère, le 14 octobre 2015 à Montréal, je ne voyais pas la nécessité d’écrire. Le suicide d’Alex m’a transpercée de chagrin, m’a mise aussi dans une colère folle. Parce qu’un suicide, c’est la double peine, la violence de la disparition génère un silence gêné qui prend toute la place, empêchant même de se souvenir des jours heureux.
Mon avis …
Un jour d’octobre, Olivia de Lamberterie apprend que son frère est décédé. Ce frère qu’elle a tant aimé, avec lequel elle a tant partagé, qui la comprenait, l’adorait. Ce suicide va la plonger dans une douleur immense. Cette femme qui lit pour vivre ne peut alors plus lire une seule ligne, obsédée par cette souffrance qui l’occupe toute entière. C’est de son frère dont elle a envie de se rapprocher, pas des histoires des autres. Alors elle va écrire sa vie, son histoire, sa mélancolie. Avec tout cet amour qui la remplit et ce manque qu’elle ressent de lui. Elle va donc nous raconter son frère, l’homme qu’il a été, et son rapport à la mort, toujours proche de lui, qui l’appelait. Cet homme avait tout pour être heureux, et pourtant. L’envie de partir l’habitait. Persuadé que, non, ça ne « passerait » pas. Qu’aucun médecin ne pourrait le soigner. Que faire face à un proche qui souhaite en finir avec la vie ?
« Lire répare les vivants et réveille les morts. Lire permet non de fuir la réalité, comme beaucoup le pensent, mais d’y puiser la vérité. »
A travers les mots de sa soeur, Alex nous devient familier. Nous découvrons un homme plein de vie, et pourtant prisonnier d’une vie trop lourde à supporter. Et c’est sans doute cela qui est si difficile à accepter pour ses proches et son entourage. Savoir qu’ils ne peuvent rien faire pour l’aider, qu’il est enfermé dans une noirceur de laquelle personne ne peut l’en sortir. Il sera finalement diagnostiqué avec une « Dysthymie », « trouble de l’humeur chronique impliquant un spectre dépressif ». Souvent très difficile à diagnostiquer, en réalité, tant la personne qui en souffre est persuadée que cela fait partie de qui elle est. Il est vrai que j’ai par moments été très attristée par la réalité de la dépression vécue par cet homme et que la lecture en est parfois difficile pour cela. Mais Olivia de Lamberterie a su écrire sans doute au plus près cette terrible maladie qui touche tant d’êtres humains qui, alors qu’ils ont a priori tout ce qui pourrait les rendre heureux, ne parviennent pas à l’être. Et préfèrent partir plutôt que de souffrir autant.
« Si, pour toi, c’est mieux, j’accepte de vivre décapitée. »
Écrire sur son frère, c’est se souvenir de lui, vivant. Enfant, adolescent, adulte. Se souvenir de ses bonheurs mais aussi de ce qui le faisait souffrir. Cette mélancolie tenace, qui ne le quittait pas. Raconter sa vie, c’est aussi ne pas l’oublier, se raccrocher à ce qu’il était. Pour la première fois de sa vie, Olivia de Lamberterie traverse ce que tant d’autres écrivains ont traversé avant elle : les mots qui surgissent d’eux-mêmes, qui s’imposent et qui prennent vie pour raconter, pour écrire. Elle découvre que parfois, l’écriture peut être vitale. Pour continuer à vivre quand la vie est insupportable de douleur.
C’est un roman très personnel, dans lequel Olivia de Lamberterie livre beaucoup d’elle-même, de sa famille et surtout de son frère. Ce texte très intime nous permet de découvrir une plume superbe qui m’a de nombreuses fois clouée face à des phrases si justes. Même si la chronologie du texte m’a parfois un peu perdue, les émotions qu’elle transmet à travers ses mots ont su profondément résonner en moi. Et ce que je retiendrais de ce roman, c’est sans aucun doute cette preuve d’amour absolue qui réside dans le fait d’aimer la personne pour ce qu’elle est, sans chercher à la changer. Quitte à accepter, même si la douleur est intolérable, qu’elle souhaite mourir si cela veut dire qu’elle est enfin en paix avec elle-même.
Pour résumer …
Une lettre d’amour à un frère disparu, emporté par la mélancolie, qui le dévorait de l’intérieur. C’est un hommage à sa famille, à leur lien fraternel et à l’homme qu’il a été, en respectant toujours ses choix et sa souffrance. C’est un roman profondément intime dont l’écriture d’Olivia de Lamberterie a su résonner en moi, tantôt douce et tantôt dure, mais toujours si belle et si juste.
Ma note : ★★★★★☆
(15/20)
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Comme toi, je suis une inconditionnelle de cette critique littéraire que suis et j’écoute et ses avis, notamment en littérature étrangère, sont très prescripteurs.
Je suis ravie que son premier livre t’ait plu car il est sur ma liste de cette rentrée de septembre.
Très beau livre , touchant. Ayant perdu ma fille . Je sais tellement se ressenti se manque. Grande admiration . Connaissant personnellement cette famille au grand cœur.
J’apprécie particulièrement cette personne qui a vraiment « la classe » dont je suis la critique très souvent sur Télématin ^-^ merci pour la découverte & belle journée à toi ☼ Bisous d’Alsace
C’est une bien joie chronique pour un superbe roman !
Bonjour. J’aime également beaucoup écouter Olivia de Lamberterie et ce titre a retenu mon attention. J’ai très envie de le découvrir.
Merci pour cet article, tu m’as donné envie de lire ce livre, j’aime beaucoup les chroniques littéraires de cette femme je vais donc m’intéresser de plus prêt à ce titre!
Ce récit a l’air absolument magnifique !
Pareil j’aime beaucoup cette critique littéraire alors forcément ce roman m’intrigue!
Ce roman fait parti des titres de la rentrée littéraire que j’aimerai beaucoup découvrir. Ta chronique me conforte dans mon choix.